Hexagone, l’école de la souveraineté numérique française

Le Figaro Étudiant
 - 

École d’ingénieurs de nouvelle génération, l’École Hexagone sensibilise ses étudiants aux enjeux de souveraineté numérique en proposant des cours d’intelligence économique. Elle a également noué des partenariats académiques avec les fleurons de la technologie française.

Il n’a jamais été question de souveraineté que ces derniers mois. La crise sanitaire a rappelé nos difficultés d’approvisionnement pour des produits aussi basiques que des masques chirurgicaux. La guerre en Ukraine met, elle, en évidence nos défaillances en termes de souveraineté alimentaire et énergétique. Dans notre économie toujours plus dématérialisée, la France et l’Europe tentent également de recouvrir une souveraineté numérique.

En l’espace de quelques mois de 2021, l’État a dévoilé sa stratégie nationale dans les domaines des technologies quantiques, de la cybersécurité et du cloud avec l’instauration de la doctrine dite « Cloud au centre » et du label « cloud de confiance ». Dans les attributions du ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Lemaire, lui a été récemment rattachée la Souveraineté industrielle et numérique. Tout un symbole.

L’Europe n’est, pas en reste, avec l’initiative Gaia-X qui vise à bâtir un environnement de confiance en garantissant l’interopérabilité des services cloud existants sur la base de standards communs.

Les accords Digital Markets Act (DMA) et Digital Services Act (DSA) doivent permettre la mise en œuvre d’un nouveau cadre européen de régulation pour lutter contre la suprématie des géants du numérique. Avec sa proposition de loi sur l’intelligence artificielle, l’AI Act, l’Union européenne entend également instaurer une sorte de RGPD appliqués aux algorithmes.

Éveiller les consciences

La souveraineté ne repose pas que sur la seule volonté du politique. À son niveau, l’École Hexagone entend éveiller les consciences de ses étudiants. Se proclamant « l’école de la souveraineté numérique française », l’établissement d’excellence a tout d’abord multiplié les partenariats académiques avec les fleurons français de la technologie.

Dans le seul domaine de la cybersécurité, l’École Hexagone s’est rapprochée d’HarfangLab qui développe un logiciel EDR (Endpoint Detection and Response) pour protéger les points sensibles et les terminaux du système d’information et de Stormshield, fournisseur de solutions de protection des réseaux, des postes de travail et des données. Pour l’un et l’autre, leurs principaux concurrents sont non européens.

L’école a également noué des partenariats avec la société Bispok, spécialisée dans le déploiement de solutions Wi-Fi, de contrôle d’accès au réseau (NAC) et d’automation sur-mesure, ainsi qu’avec le provider de cloud public 3DS Outscale (filiale de Dassault Systèmes).

Objectif : montrer aux étudiants qu’il existe des solutions alternatives franco-européennes aux propositions étrangères, pour la plupart américaines. « Une fois en entreprise, les jeunes diplômés préconiseront tout naturellement les solutions françaises sur lesquelles ils ont été formés », se réjouit Sébastien Dhérines, Président de l’École Hexagone.

La pression des GAFAM

Cette sensibilisation est d’autant plus essentielle que la pression des GAFAM sur l’écosystème d’innovation hexagonal est particulièrement forte. Sébastien Dhérines dénonce notamment le piège des crédits gratuits des géants du cloud. Amazon Web Services, Microsoft Azure ou Google Cloud mettent à disposition aux startups françaises des ressources cloud pouvant s’élever à des dizaines de milliers de dollars.

« La startup se développe avec les services du provider, poursuit-il. Une fois la période de gratuité terminée, elle en devient captive, la réversibilité étant difficile dans la mesure où les priorités sont ailleurs. Si cette jeune pousse fait une levée de fonds d’un million d’euros, on peut estimer que 5 à 20 % est capté par un acteur du cloud américain. »

Les GAFAM investissent, par ailleurs, dans les sociétés technologiques françaises quand ils ne les rachètent pas. Une richesse qui ne profitera peu ou pas à l’économie nationale compte tenu du système d’optimisation fiscale mis en place.

Se pose, enfin, la question du principe d’extraterritorialité propre au droit américain. Le Cloud Act contraint ainsi les fournisseurs américains à divulguer des informations personnelles sur leurs utilisateurs dans le cadre d’enquêtes judiciaires, même si les données ne sont pas hébergées sur le sol états-unien. « Avec le Cloud Act, l’Administration américaine a également la possibilité de fermer du jour au lendemain le service d’un provider américain », complète Sébastien Dhérines.

Pour sensibiliser ses étudiants à ces enjeux, l’École Hexagone propose, à partir de la quatrième année, des cours d’intelligence économique. Soit une soixantaine d’heures sur deux ans. Ces cours sont dispensés par Cyril Bertschy, co-gérant de Bispok et diplômé de l’École de Guerre Économique.

« Au-delà de leurs compétences techniques, il est important que nos ingénieurs aient cette dimension stratégique et géopolitique du numérique, conclut Sébastien Dhérines. En ayant toutes les cartes mains, ils prendront demain, dans leur vie professionnelle, les meilleures décisions. »